Ce projet vit le jour dans le cadre de l’Université d’été de Salzbourg en 1965. Depuis 1956, Konrad Wachsmann avait fait de cette académie un laboratoire de méthodes pédagogiques. Le séminaire de 1965 fut dirigé par Jacob Bakema, qui avait exploré déjà les thèmes de l’aménagement collectif et développé plusieurs projets de mégastructures. Bakema ne fut toutefois pas en mesure de considérer avec un sérieux total les propositions « utopistes » de Feuerstein. En dépit d’une forme de surenchère visionnaire, l’extension proposée de Salzbourg découlait pourtant de principes urbanistiques établis : Feuerstein envisage une densification résolue et partielle, fondée sur le principe d’unités de quartier hiérarchisées. La densification verticale devait permettre de conserver la campagne environnante et la vieille ville, qui ne serait supplantée par de nouvelles constructions que progressivement. L’équipement technique du projet révèle ensuite une approche techno-futuriste, avec ses modes de transport rapides électrifiés et automatisés, et ses panneaux d’affichage lumineux omniprésents ; le mot « wählt » (« votez » ; « choisissez ») renvoie à une notion essentielle de la cybernétique, mais aussi aux interrelations entre installations consuméristes et socio-politiques dans le centre-ville, à l’instar des concepts élaborés par Victor Gruen pour les shopping malls suburbains dans les années 1950. Les multiples réseaux de tuyauteries verticales ou horizontales produisent une impression de ville-machine gigantesque, comme sur les dessins d’architectes de l’époque comme Abraham, St. Florian, mais aussi de Dallegret. Le traitement formel du projet révèle toutefois l’intérêt particulier de Feuerstein pour les formes archaïques, pour ces « archétypes » par lesquels il cherchait à établir un concept architectural fondé sur la psychologie.
Cornelia Escher