Hugues Reip

Building, 1993

Cette œuvre trouve sa référence dans une interprétation du modèle architectural qu’est l’immeuble de logements collectifs, avec sa structure parallélépipédique et ses fenêtres alignées identiques. Hugues Reip transpose cet archétype dans une structure réalisée à partir d’un ready-made, un sèche-linge entouré d'un drap blanc sur lequel apparaissent des fenêtres dessinées au trait noir sur l’équivalent de sept étages. Seuls des volets roulants ou stores vénitiens plus ou moins ouverts rendent comptent d'une activité intérieure possible. Ce détournement accentue jusqu’au ridicule la « pauvreté » de ces architectures sans qualité ; la toile qui ne couvre que du creux évoque ici le façadisme stérile. Jouant avec la réduction des échelles, la finesse du support et la légèreté de la structure, l’artiste ramène l'architecture au niveau du domestique, un sèche-linge, où, sans fondation, elle n'est plus qu'un drap en train de « sécher », débarrassée de tout fonctionnalisme et de toute attention à l’individu qui habite les lieux. Créant une œuvre qui sonne définitivement comme un oxymore, Hugues Reip semble revendiquer le détournement des matériaux et des procédures du réel : cette sculpture dessinée figure un immeuble d’habitation dont les roulettes renvoient aussi à une certaine utopie de la mobilité.

Nadine Labedade

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