C’est dans le quartier cossu et résidentiel d’Anfa, à Casablanca, que Jean-François Zevaco construit son habitation et atelier (aujourd'hui détruits). Loin de l’esthétique moderniste, blanche et exubérante de ses premières constructions casablancaises, la villa Zevaco développe le vocabulaire plus fermé et introverti des habitations qu’il conçoit dans les années qui suivent l’Indépendance du Maroc. Développant ses constructions à partir de plans en étoile, il invente alors un nouveau langage architectural fait de murs obliques entre lesquels sont aménagés des patios, un séjour, ou des espaces de nuit. Ainsi, le plan de la villa est constitué de multiples branches qui rayonnent à partir d’un grand séjour circulaire. Obscure et fraîche, la pièce, au fort dénivelé et dans laquelle s’élèvent des sièges en gradin, est recouverte d’émaux. Comme au fond d’une grotte, une fontaine alimente un ruisseau sinuant qui coule à travers le salon. La seule source de lumière est un large oculus au centre de la pièce sur lequel l’architecte fait coulisser un toit en verre ou, selon le temps, des treilles en bois filtrant la lumière et rappelant l’univers des souks. Depuis ce cercle intime, partent les multiples murs de refends, inclinés, qui comme autant de branches d’une étoile, desservent les autres espaces de vie de la maison. En façade, n’est visible qu’un enchevêtrement de murs obliques, aveugles et infranchissables. Ne laissant rien paraître de son intérieur, la villa, entourée de roches, de plants d’agaves et de cactus, se donne comme une barrière immuable et piquante, et dont le portail d’entrée fait de chardons métalliques (réalisé par le sculpteur Olivier Seguin) en est sans doute la plus juste illustration.
Lucy Hofbauer