Entre 1973 et 1984, Jozef Jankovič a élaboré plus de cent projets d’architecture visionnaire. La série contient des projets de bâtiments publics, dont une sous-catégorie comprend des bâtiments d’institutions de la propagande ; elle inclut également des monuments, tribunes, centres culturels, cités d’habitation, hôtels et villas particulières pour des artistes, politiciens, membres du Parti Communiste Tchécoslovaque. Pour produire ses projets, Jankovič utilise les techniques suivantes : le dessin (à l’encre, au feutre ou au crayon), la peinture à la tempera, la lithographie, la sérigraphie, la photolithographie, l’impression offset ou encore le photocollage. À partir de 1976, les projets prennent également la forme de graphiques produits par ordinateur. Jankovič opère avec des vues stéréométriques sur des fonds colorés. Il dessine des bâtiments publics en associant des formes cylindriques et cubiques dont les angles sont arrondis. D’autres immeubles sont constitués de structures géométriques, entremêlées de motifs organiques. Ces édifices ont pour motif récurrent la forme d’un corps humain monumental, souvent déformé ou fragmenté.
L’artiste prend ses distances avec l’architecture moderne. Ses propositions de mégastructures, de bâtiments pneumatiques et d’architecture mobile deviennent des caricatures de réalisations, tant de l’architecture fonctionnelle que du réalisme socialiste. Les projets de Jankovič, souvent à caractère dystopique, constituent une réponse aux espoirs et peurs de son temps ; ils se réfèrent de manière ironique à la propagande des États socialistes, à la rhétorique de la Guerre Froide, à toute idée de progrès. Associées à l’art conceptuel, les propositions de Jankovič demeurent de l’architecture sur le papier ; elles ont été créées sans que Jankovič n’ait l’objectif de les faire construire. Durant la période communiste, elles n’ont jamais été exposées dans les institutions artistiques officielles tchécoslovaques.
Katarzyna Cytlak